AUTORITÉ DE L’HISTOIRE
Pauvre Europe
Un nouvel entretien -en fait : une nouvelle écoute- des paroles de ce vieil ami de mon père. Des propos qui semblent poser, à nouveau, la question des rapports que nous entretenons avec nos ancêtres qui nous ont fait ce que nous sommes. Quelle est l’autorité de ces ancêtres ? Qu’en faisons-nous ?
Et d’abord : parlons de cette Europe ! La France, on ne fait plus ça. Cette Europe est le rêve de nos contemporains. Amour d’obligation ! Simplement, il faut savoir de quoi on parle. Un grand marché apatride qui, sous le capuchon de l’OTAN, transforme les états en provinces et ses armées en forces supplétives. Pour un monde meilleur ?
Comme disait un homme politique lucide qui était, au départ, un européen convaincu (Michel Rocard en 2010) : Il n’y aura pas d’Europe politique, le rêve en est aujourd’hui mort.
En fait, sous le nom d’Europe, c’est un grand marché qu’on voudrait nous vendre. Le grand marché inter-atlantique. Les frontières sont abolies ! Ou plutôt : elles sont celles du profit, le profit-roi ! Si c’est bon pour le profit : on le fait, immédiatement. Même s’il faut, pour cela, fermer une entreprise, ou la délocaliser…
C’est aussi la mort des « services publics » : s’ils sont rentables, ils seront privatisés ! S’ils ne sont pas rentables : ils seront simplement fermés. C’est déjà vrai pour la poste, pour les hôpitaux publics, les écoles, les chemins de fer , les « services publics » bradés à des sociétés privées (autoroutes, électricité…) et même pour les gendarmeries… Nous voyons déjà le début du processus…
Quant aux états, on les démantèle, peu à peu… au profit des régions. En sorte que les parlements nationaux sont des assemblées de plus en plus formelles. On parle de crise économique, c’est évident, mais on ne parle guère de crise politique : le manque de représentativité des parlement et sénat. Où es-tu démocratie ?
Ouvrons les yeux : déjà plus de la moitié des français ne votent pas pour ce parlement ! Mais de cela on ne parle pas. Il suffit d’être élu et réélu ! Le peuple n’est guère concerné par ces jeux politiciens.
D’ailleurs, aucun travailleur ne figure au rang des élus. Par contre, quarante pour cent de fonctionnaires siègent dans cette « assemblée nationale » ! Pourtant, il n’y a pas encore quarante pour cent de français fonctionnaires… seulement les « représentants » qui, s’ils ne sont pas réélus, peuvent, comme on dit, rejoindre leur corps d’origine. Ce que personne ne peut faire s’il n’est pas fonctionnaire !
Sans doute, nous avons le gouvernement que nous méritons. Nous n’avons peut-être pas voté pour lui, mais nous avons laissé faire… Il faudrait, sans doute, une révolution pour changer cela. Non une révolution faite de violences et destruction, certes, mais pas non plus de révolution « dans le respect des lois » ! Une révolution ne respecte pas les lois : elle les change ! Ce serait alors la fonction d’une assemblée populaire… constituante ! Nous en sommes loin…
La montée des populismes, un peu partout en Europe, devrait faire réfléchir les partis traditionnels. Leurs carences sont la cause de la montée de ces populismes… et nous n’en sommes qu’au début !
Pourtant, cette Europe était un grand projet : réunir des nations qui ont si souvent connu la guerre et ses souffrances, pendant des siècles… Et sur ce point, l’Europe ne reviendra pas en arrière. Quelle que soit la forme de cette Europe… Nous ne reviendrons pas aux guerres du passé. Mais il faut savoir, aujourd’hui, de quelle Europe nous parlons…
Ceux qui disent que critiquer cette Europe actuelle, revient à critiquer le projet européen sont dans l’erreur. Le projet était beau : la réalité actuelle en est la caricature. Et cette caricature est la mort des peuples ! Les actuels artisans de l’Europe voudraient-ils faire cette Europe sans tenir compte des peuples européens ? C’est déjà ce qu’on voit : lorsque des peuples refusent cette « constitution » : ce texte rejeté démocratiquement devient cependant la réalité obligée. Et les parlements n’ont rien dit à ce sujet…
ll eût fallu,construire, certes lentement, une Europe véritablement européenne : démocratique et sociale. Et pour cela, l’approfondir avant de l’étendre. Et se doter, dès le début, d’une véritable constitution, avant de demander à des nations voisines de rejoindre les premiers européens… Mais cela ne convenait pas aux protecteurs américains qui préféraient une large Europe aussi grande que possible, mais divisée, unie dans l’alignement…
C’est ainsi que le rêve est devenu un grand marché apatride de nations mises en cage, par le biais de l’OTAN. D’autant qu’une commission atlantiste ne manquera pas de s’aligner sur les intérêts du grand protecteur et de ses suppôts européens.
Une telle « Europe » anti-russe et pro-israélienne est un conglomérat de nations alignées … Seul le profit de quelques uns donne le ton ! Cela peut-il durer ?
Une erreur grave a été de renoncer à une Europe véritablement européenne, dotée d’une défense non dépendante des orientations américaines. Une Europe véritablement démocratique et sociale… Non hyperlibérale !
Il faudra sans doute encore beaucoup de délocalisations et quelques millions de chômeurs de plus pour que les peuples, peut-être, s’éveillent. Et ce jour-là, d’autres élus, enfin, feront entendre la voix des peuples !
En attendant ce jour, bien des déclarations officielles donneront le change et seront largement diffusées par tous les moyens d’information. Les commentateurs actuels peuvent bien s’opposer sur des nuances, mais rarement ils n’aborderont l’essentiel, sous peine d’être contredits et même de perdre leur tribune.
D’ailleurs : que le conformisme de tel journaleux nous révulse : cela ne doit pas faire oublier qu’il a été choisi (et nommé, et maintenu) pour dire ce qu’il dit. Il ne fait donc, avec talent parfois, que le travail pour lequel il a été nommé. Ainsi, même une absurdité bien dite devient une vérité télévisuelle. Parfois, l’exemple vient d’en-haut !
Et quelle absurdité de décréter -lors d’un sommet de l’OTAN à Lisbonne- que l’Europe allait se doter d’un bouclier anti-missile, destiné -sous commandement américain- à être une défense efficace. Contre qui, cette défense ? Quels missiles menacent ces européens qui, incapables de se défendre, devraient s’en remettre à l’OTAN ! Mensonges… officiels !
Un premier ministre français a même plaidé, à Moscou, en faveur de ce bouclier anti-missile contre un « péril » .. imaginaire. Les terroristes doivent bien rire de ces déclarations. Leurs armes de destruction massives sont inexistantes, comme jadis celles d’Irak. Ce qui, d’ailleurs, n’a pas empêché une guerre meurtrière pour les populations irakiennes…
Mais il faut bien que l’OTAN se trouve aujourd’hui une raison d’être et, donc, s’invente un nouvel ennemi. Dans le cas présent, autant vouloir tuer des moustiques à la mitrailleuse. Et, sans doute, ce sont les européens supplétifs qui tiendrons la mitrailleuse…
Toutes les dictatures, présentes et futures, ont besoin d’un allié : la peur. Tour à tour : peur du communisme, peur de l’islamisme, peur du terrorisme… Et pour lutter contre cette peur, on a besoin d’un gouvernement fort, lequel ne pourrait pas subsister si une telle peur n’existait pas. La vérité, la justice, les droits humains… sont de peu de poids, face aux pouvoirs des états.
Autrefois, la France
Deux mots pour ceux qui croient que l’histoire : c’est du passé. En fait, l’histoire : c’est de la mémoire. Et la question posée aux vivants c’est de savoir s’ils sont dignes de cette mémoire.
Bien des traitrises, négligences, manques de vision, frivolités régnantes, superficialités à la mode… ont peu à peu, durant des siècles, amené la France à devenir, à moins qu’elle ne se ressaisisse, une province parmi les nations alignées, un protectorat, voire un grand mouroir, une immense maison de retraite…
Rappelons quelques moments de cette lente descente qui mène un grand peuple à la décadence et au naufrage actuel.
Dans les débuts de son histoire, les ancêtres avaient mis sur les rails une grande nation. Après une histoire déjà longue, des souverains tels que Louis XI, Louis XII, François premier, Henri IV, Louis XIII… ont -chacun à sa manière propre et en son temps particulier- été les artisans d’un grand ensemble.
Pendant ce temps, un Jacques Cartier (sous Henri IV) fondait une nouvelle France grosse de promesses. Et malgré l’incurie française, c’est le grand mérite des canadiens francophones d’avoir réussi à subsister et à se développer, aujourd’hui encore… Dignes descendants de ce qui fut un grand peuple !
La première erreur grave fut la révocation de l’édit de Nantes (1685 : Edit de Fontainebleau). Par cette révocation, beaucoup de protestants (ceux qui réussissaient à quitter le royaume) furent accueillis dans divers pays d’Europe (Suisse, Allemagne, Hollande…). Parmi eux des entrepreneurs et artisans qui fondèrent là de nouvelles entreprises.
Ajoutons que cette funeste décision a décapité la marine française. Beaucoup d’officiers étaient protestants et se retrouvèrent bannis. La même année que cette révocation, est aussi proclamé le terrible « code noir » qui restera longtemps en vigueur.
Mais le pire était à venir ! Louis XV est la source de malheurs irréversibles. Rappelez-vous : les guerres inutiles, les victoires même sans aucun profit. Fontenoy et la guerre pour le roi de Prusse… Au traité d’Aix la Chapelle (1748) on verra même la France renoncer à ses conquêtes !
Autre erreur du fastueux Louis XV : céder les Indes et, surtout, le Canada, lors du honteux traité de Paris (1763) ! Ce qui devait avoir une conséquence grave lorsque, plus tard, le premier consul Napoléon Bonaparte jugera bon de brader l’immense Louisiane devenue indéfendable. Du coup, pour les petits états américains : nouvelle frontière, ruée vers l’Ouest lointain, grande aventure…
En effet, il suffit de regarder une carte pour voir que ces immenses territoires, étaient bordés, jadis, par les petits états américains à l’Est, le Canada devenu anglais au Nord, la vice-royauté de la Nouvelle Espagne à l’Ouest… et que, dès lors, il aurait été bien difficile de défendre ces territoires : un vaste triangle, pointe en bas (la Nouvelle Orléans). Evidemment, la situation eût été différente si le Canada, au Nord, avait été français !
Du coup, tout ce que les français avaient fait, de la Nouvelle Orléans jusqu’au lac Champlain, en passant par Saint Louis, Détroit, Des Moines… était effacé. Sait-on que des français avaient fondé Chicago ! Mais, aujourd’hui, rares sont les cours d’histoire qui le rappellent !
Et en ces temps nouveaux de France seule au coeur de l’Europe, la situation était devenue bien différente. Surtout avec une marine héritée des années de révolution ! D’ailleurs Napoléon, le grand général, utilisa une grande armée de terre et, pendant douze ans, défit toutes les armées d’Europe. Il eut toujours moins de chance sur les mers (d’Aboukir à Trafalgar…).
Certes au début, les victoires ont été grandes. Mais après la Bérézina et Waterloo, il fallut déchanter. Ensuite, il a fallu passer à la facture. Et cette facture fut lourde … pour la France, dans des frontières nouvelles.
Ces désastres n’étaient pas les derniers. Si le grand Napoléon avait, en son temps, brisé la France tout en la couvrant de gloire posthume, son descendant, troisième du nom, brisait ce qu’il en restait. La France n’a jamais eu de chance avec l’empire : un empire qui l’a toujours rendue plus petite qu’il ne l’avait trouvée.
Evidemment, Napoléon III n’avait plus autant de territoires à brader. L’empire devait apporter paix, a-t-on dit en 1853 ! Au lieu de cela, quelques guerres inutiles (Crimée, Italie, Mexique) furent suivies de la malencontreuse guerre de 1870 qui amputait la France de l’Alsace-Lorraine.
Et cette guerre funeste a été la source de la grande « revanche » de 1914-1918… La grande boucherie héroïque : une coûteuse victoire, qui devait aboutir à un traité de Versailles qui humiliait l’Allemagne et devait engendrer un autre désir de revanche… et faire naître le nazisme. En ce sens, la deuxième guerre mondiale est fille de la première.
Notons que la percée de Sedan semble avoir été régulièrement ignorée par un haut-commandement français à la compétence limitée. Car enfin, les prussiens étaient passé par là en 1870, les allemands en 1914… et aussi les nazis en 1940. Le commandement ne pouvait ignorer qu’une petite route à travers la forêt menait à cette percée qui descendait vers Sedan.
Le général Joffre est en 1914 le chef d’une armée certes courageuse, mais largement imprévoyante… En ce temps-là, les envahisseurs avaient traversé la Belgique et n’avaient été arrêtés, difficilement, que sur la Marne ! Il n’est pas étonnant que le général Joffre soit traité d’âne dans un grand journal (Le Monde diplomatique : Un âne qui commandait des lions). Quoique le généralissime de 1940 mériterait bien pire (la baderne généralissime Gamelin !). …
Il est vrai qu’en 1940 la défaite était souhaitée par ceux qui craignaient surtout le bolchevisme… C’est pourquoi l’imprenable ligne Maginot s’arrêtait avant la percée de Sedan… Malgré les mises en garde d’une commission parlementaire française et malgré les envoyés du roi des belges de l’époque (les envahisseurs germaniques avaient déjà traversé son pays pour passer par la fameuse percées de Sedan… non défendue !).
Mais le ministre de la guerre était, déjà, la fameux maréchal Pétain. Tout avertissement était donc inutile. Et surtout : ne pas garder cette zone de la frontière. Venez, messieurs les envahisseurs, cette zone n’est pas gardée !
D’ailleurs, la propagande journalistique de l’époque répétait : Nous vaincrons parce que nous sommes les plus forts. Puis, lorsqu’il a fallu mobiliser : La mobilisation n’est pas la guerre !
Il faut dire que personne ne voulait cette guerre, tant la guerre précédente avait laissé de terribles souvenirs ! En sorte que Daladier, comme son homologue anglais Chamberlain, furent accueillis en héros, à Londres et à Paris, après avoir signé les honteux accords de Münich. Ils avaient -disait-on-sauvé la paix !
Malheur à la Tchécoslovaquie de l’époque : envahie par les nazis, avec l’accord des puissances « démocratiques » ! Il faut rappeler cette parole de Churchill, en ce temps-là :Vous aviez à choisir entre le déshonneur et la guerre ! Vous avez choisi le déshonneur : Vous aurez la guerre ! On connaît la suite…
Les années qui suivent sont celles de la honte. Non tant de la défaite que celle de la collaboration, laquelle incluait une chasse légale des juifs de France. Pour mémoire, la rafle du Véldiv est opérée par la police française, le camp de Drancy (l’antichambre de Auschwitz) est une création française… Sans parler de cette honteuse « arianisation » des entreprises juives et de la généralisation de la chasse aux juifs, aux résistants, aux opposants de toutes sortes… afin de plaire à l’occupant.
Cette occupation et la collaboration de beaucoup restera comme une verrue sur la main de la France. Les divers mouvements de résistances cependant, même rares au début de cette occupation, sont autant de fleurs fragiles en cette main…
Une défaite n’est pas honteuse, si l’on s’est bien battu. Mais on se relève plus difficilement de la honte. Cette dernière laisse des traces ! Les démons sont toujours vivants dans l’obscurité de la mémoire. Ils ne meurent qu’à la lumière.
De cette occupation, pourtant, il faut rappeler une réalisation : Le mur de l’atlantique ! Cet énorme travail de plusieurs années (aux frais de la France) est largement oeuvre d’ entreprises françaises au service de l’occupant… Cet ouvrage n’aura résisté que quelques heures, sur une petite partie de son tracé ! Que d’efforts pour un résultat si mince… Mais en même temps, c’était le début de la fin du nazisme et de la collaboration française !
Venons-en à la situation d’aujourd’hui, aux errances actuelles. Ne parlons pas de ces guerres menées contre des peuples (les « guerres coloniales »). Que d’énergie et de courage dépensés pour des causes inutiles et des guerres perdues.
Pendant quelques années, la France de De Gaulle pourra faire illusion. En une époque terrible, il avait drainé derrière lui une pléiade de héros dont quelques uns ont payé cher leur fidélité. Plus tard, c’est lui encore qui nous a transmis une France sortie de l’OTAN, libre, prospère, renouant avec son passé. Ce temps-là est bien fini.
Aujourd’hui, nous en sommes venus à transformer nos troupes en supplétifs… Lesquelles, sous la bannière de l’OTAN, vont faire des guerres étrangères au peuple français. Reconnaissons que le parlement français ne s’est pas montré opposé à cette allégeance ! Simplement : il n’en parle pas…
Plus grave encore : ce mensonge selon lequel la « mondialisation » serait compatible avec la démocratie ! En réalité, il n’est de démocratie que dans un cadre national. Seul le profit peut être « mondialisé ». Et il transforme, peu à peu, les citoyens en consommateurs.
Soyons clairs : « démocratie » est un terme du langage politique. L’économie ignore cela : un chef d’entreprise n’est pas élu, mais il est choisi en fonction de ses compétences. Concrètement, il est jugé sur le chiffre des ventes. La démocratie n’a rien à faire ici.
Parler de « démocratie de marché » est un attrape-nigaud : les termes sont contradictoires ! La marchandisation du monde ne va pas dans le sens de la démocratie, mais dans le sens de l’intérêt du plus fort. Evidemment, tout empire tentera de se parer des vertus de démocratie, de liberté, de justice etc….. C’est d’ailleurs bon pour les ventes !
Jadis et demain
Dans ce cadre (dans cette agonie) la langue usuelle exprime bien la situation actuelle. La langue que nous parlons illustre cet état de fait. Le jargon de nos informateurs est à la pointe du phénomène. Télé et radio ont, certes, une grande responsabilité dans cet envahissement quotidien du jargon.
Je suis toujours étonné par ces usages jugés, autrefois, incorrects. Ainsi, nous apprenions :
« je me souviens de quelque chose », donc « je m’en souviens ». Mais « je me rappelle quelque chose », donc « je me le rappelle ».
Voilà un usage ignoré de nombre de journaleux… Combien de fois n’ai-je pas entendu : « je m’en rappelle ». Ou même : « OK, je me rappelle de ça ! ». Voyez comme je suis vieux : un tel usage me choque toujours…
Mépris ou simple ignorance? La langue semble être le cadet des soucis des journaleux qui nous informent ! Cela étant, je ne peux faire autrement que de me méfier de leurs informations, faites à la va-vite… Superficielles, certes, mais bien emballées (qualité « pro »). Et ils connaissent bien l’art du rejeu (pardon: du remake). Pour eux, bien répéter ce qu’on entend partout, au moins pendant un temps, c’est de l’information.
Est d’actualité : ce dont on parle. Si l’on n’en parle pas : ce n’est pas d’actualité. Mais ce dont on parle beaucoup est d’une brûlante actualité ! Le silence est ce qui n’existe pas. Mais le bruit, le remue-ménage, le boucan, le barouf, le ramdam (le buzz, comme ils disent)… voilà l’actualité… C’est le style, le clinquant, qui seul importe !
Bon, cessons pour aujourd’hui, on doit demain me faire passer au tomo… Qu’est-ce qu’un tomo ? C’est l’abréviation de tomodensimètre. Ça vous étonne ? On dit bien : un vélo (non un vélocipède), un stylo (non un stylographe), un cinéma (non un cinématographe), un métro (non un métropolitain), une photo (non : une photographie) … Jadis, on abrégeait justement, et l’usage s’est imposé. Mais, aujourd’hui, on ne fait plus ça ! Au lieu des abréviations de jadis, la langue actuelle préfère un mot étranger.
Pourquoi n’aurait-on pas pu dire un «tomo» pour un tomodensimètre ? Non, il faut dire un scanner . Et nul n’imaginerait, aujourd’hui, que l’on dise autrement. La défaite est accomplie. Le nouvel usage commande.
Pour en rester un instant aux abréviations qui auraient été possibles, citons vérif (vérification), au lieu du tchékeup. Ou encore l’info (information), au lieu de l’horrible niouz.
Et ne parlons pas de ces ignorances orthographiques qu’Internet fait connaître à ceux qui fréquente les « sites » d’information… ce grand étalage de l’ignorance de nos contemporains.
Nombreux sont ceux qui semblent ignorer que « différend » est autre que « différent », « tache » est différent de « tâche » ; « mal » différent de « malle », « mâle »… ; de même : « mettre, maître, mètre »… ou encore : « mère, mer, maire », « cote » et « côte », « sa» et « ça »…
Que d’homophones ! L’orthographe est indispensable, surtout lorsque la prononciation ne marque pas de différence. Mais beaucoup semblent considérer que les homophones sont des homographes !
Et cette orthographe risque de ne pas s’améliorer. Savez-vous qu’un ministre de l ‘éducation nationale propose d’imposer aux gosses d’étudier l’anglais dès l’âge de trois ans ! Cela joint aux milliers de suppressions de postes de professeurs…
Parfois, le français écrit par telle publication m’est incompréhensible. Look smoking assez casual... Je ne sais pas ce que cela signifie, mais lire ce french est au-dessus de mes forces.
Mais laissons ce sujet de la langue. Nous en avons déjà parlé la dernière fois … Simplement, le sujet me tient à coeur parce que la langue que nous parlons témoigne de ce que nous sommes réellement.
Quel avenir pour la France que nous allons léguer ? Chose étonnante: nous sommes des héritiers, mais non des continuateurs ! Beaucoup de nos anciens ont donné leur vie pour ce pays et son drapeau… Un drapeau qui est toujours le nôtre… Mais, de nos jours, ce drapeau est presque inconnu.
Pourtant, le drapeau est vénéré aux USA, comme aussi en Chine ou dans beaucoup de pays,mais chez nous le drapeau est largement inconnu. Sauf, parfois, s’il est accompagné par un drapeau dit « européen » aux 12 étoiles dont personne ne sait de quoi elles sont le signe (12 apôtres ? 12 tribus ?). Peu importe. D’ailleurs personne ne voudrait mourir pour ce drapeau. Ni d’ailleurs pour cette Europe. Quel avenir pour ce qu’on ne voudrait pas défendre autrement qu’en paroles ? Il est vrai que notre défense est censée être assurée par l’OTAN. Dérision !
Avant de nous séparer, j’ai envie de vous citer Valéry, Paul Valéry, un poète qui m’a accompagné tout au long de cette vie :
L’idée du passé ne prend un sens et ne constitue une valeur que pour l’homme qui se trouve en soi-même une passion de l’avenir. L’avenir, par définition, n’a point d’image. L’histoire lui donne les moyens d’être pensé. … L’histoire alimente l’histoire. (1)
C’est ainsi que nos ancêtres sont ceux qui nous guident sur nos chemins actuels. Certes, ils ne peuvent pas faire le chemin à notre place, mais ils sont une lumière sur notre route. Evidemment, nos pas sont notre responsabilité, mais ceux des anciens nous instruisent : même leurs erreurs nous informent. Allons…
Le temps était venu de nous séparer. Certes, mon vieil ami avait raison. En tout cas sur un point : L’amour de cette patrie qui lançait en avant nos ancêtres n’anime pas tous nos contemporains. Dès lors, notre présent est incertain et notre futur est douteux. Les idées, les paroles… n’ont guère de force par elles-mêmes. Il faut que l’amour les anime et que la mémoire les guide !
Note
(1) P. Valéry : Regards sur le monde actuel (Oeuvres II, bibliothèque de la Pléiade, p 917).